Description de l'œuvre

Classification : Peinture
Matériaux : peinturhuile, huile-sur-toile
Dimensions : Grand / Paysage
Hauteur (cm) : 230
Largeur (cm) : 300
Longueur (cm) : 3
Nombre d'exemplaires : Unique
Année de création : 2016

La figure du canard géant gonflable (Rubber duck) crée par Florentjin Hoffman persistait dans ma mémoire pendant des semaines. Cette énorme installation itinérante m’obsédait. Pour moi, il était la matérialisation d’un désir d’enfance. Au début, je l’imaginais comme une ancre au milieu d’une forêt, dissimulée par un dense feuillage, au milieu de la nuit. Il a rapidement évolué à travers mes premières couches. Sa figure s’est démantelée, multiples becs de canards se sont invités et la légèreté de sa structure s’est lentement alourdie. Ce nouveau corps était soutenu par un groupe d’hommes et de femmes à genoux essayant de se cacher sous son ventre. On repère également la patte d’une sauterelle avec des motifs disruptifs sur la surface. Autour de lui, la mer dessine un paysage méditerranéen paisible au milieu de la nuit, traversé par un feu de projeteur illuminant la végétation et ses habitants. « Duck and cover » traduit littéralement en français « Canard et couverture », relation ambigüe et arbitraire de cette figure hybride. Le titre fut emprunté à une campagne de propagande américaine au début de la guerre froide. Dans ce scenario « Duck and cover » se traduit « Plonge et couvre toi ! » ou « couche, couvert ! ». Il était destiné aux enfants afin qu’il puisse apprendre le protocole de protection en cas d’attaque nucléaire. L’absurdité et le non-sens de l’action propagandiste prenait forme à travers un court métrage. On représente une scène avec une tortue et un singe. Le singe explose un feu d’artifice, obligeant la tortue à trouver refuge dans sa carapace. Le canard érigé de toutes parties reprend, dans la peinture, cette notion du non-sens de la carapace. Il prétend de servir, comme une structure dissimulatrice. Ce groupe de personnes prétendent l’utiliser, étant que camouflage, comme un refuge mobil, dissimulé au milieu de ce territoire menaçant, quand lui-même représente l’archétype de la cible. La figure du canard devient complètement dysfonctionnelle. L’atmosphère des visions nocturnes ne laisse pas la place pour se cacher. La lumière qui tombe du ciel annonce, peut-être, l’inévitable pour ces gens. Les doubles images peuplent cette scène. Des oiseaux géants font apparition pour dévorer ses personnes dans leur piège ou pour dévier l’attention de ceux qui ciblent. La peinture demande en continue un scepticisme visuel, et celui, compris comme un refus de se fier toujours aux simples coups d’œil et aux premiers impressions.

À propos de l'artiste

Peintre figuratif né en Colombie, actuellement je vis et travaille à Bourges depuis 2010.
Dans mon travail chaque peinture demande une nouvelle stratégie pour percer la surface de la toile. Je pars souvent d’une image ou un petit détail qui me permet d’ouvrir et d’élargir ce territoire d’émergence qu’est pour moi le tableau, mais chaque peinture se déroule selon ses propres règles.

Des images trouvées, des prises de vue, des endroits parcourus, des références dans l’histoire de l’art sont souvent mes sources de départ. Ces éléments fixent la toute première intention qui évolue une fois que le processus commence. Le traitement de la couleur et de la lumière me permet de comprendre la vie à l’intérieur du tableau, et ainsi de voir comment il se déploie devant moi, comment il se fracture et montre/cache différents personnages et différentes situations. Je suis fasciné par cette incertitude et ambiguïté constante qui me permet de suivre les multiples lignes qui connectent chaque élément à travers l’acte de peindre.

La figure se donne à deviner: Les hommes / femmes masqués, les créatures hybrides, les animaux et les plantes se fondent dans le décor. Entre assemblages instables et exubérance végétale, le jeu, le déguisement, le camouflage, construisent un environnement suspect. Les «images potentielles» surgissent constamment. Ils nécessitent toujours une participation active de l'acte de regarder afin d'actualiser en permanence ce que nous pensons savoir ou ressentir dans le tableau. Nous nous rendons compte que “nous sommes toujours dans l’équivoque”. Ces stratégies nous invitent à rester dans le tableau, dans l'ensemble comme dans le détail. Ce processus me permet de mettre en relation différents états en transition. Le froid/chaud, le dehors/intérieur, le haut/le bas, la présence/l’absence, la vie/ la mort, etc. Ces états ne se présentent pas seulement comme opposés qui se repoussent, mais plutôt comme une trame, un tissu complexe qui rappelle au vécu du moment et à la mémoire, à ce qu’on saisit pour le raconter, alors que ce qui nous échappe par le langage prend sens dans son dédoublement, à travers la forme et la couleur.
L’acte de peintre érige un archétype hybride, entre animal nocturne et sniper : quand on peint on voit sans jamais être vu. Cette place privilégiée est la promesse d’un pouvoir sur le monde qui s’ouvre devant nous.

Duck and cover

par Adrian Caicedo
12000€